La nouvelle Honda Fireblade « triple R » est faite pour la piste

Publié le 4 février 2020 par Sébastien Suchet, mis à jour le 16 septembre 2021.

Photos: Francesc Montero, Zep Gori.

Test Honda

La nouvelle Honda Fireblade « triple R » est faite pour la piste

Notre essai de la nouvelle version de la CBR 1000 RR-R s’est déroulé exclusivement sur le circuit de Losail, au Qatar. La nouvelle CBR a beaucoup plus de chevaux, est nettement plus rigide, et ses aides électroniques au pilotage progressent à grands pas. Mais elle reste utilisable par des non experts.

Faire rouler la nouvelle Honda Fireblade sur le circuit de Losail, au Qatar, utilisé notamment en MotoGP, c’est le plan concocté par Honda pour présenter à la presse internationale la toute dernière évolution de sa superbike. Evolution qui est désormais affublée de trois R dans son nom. Avant, on disait CBR 1000 RR (pour Race Replica), à présent c’est CBR 1000 RR-R. Comme pour souligner son caractère encore plus sportif. Ce troisième R n’est pas qu’un artifice de langage. La nouvelle Fireblade est bel et bien une moto conçue pour la piste, d’abord. Et éventuellement pour la route, nous n’avons pas testé. L’essai s’est déroulé en présence de plusieurs pilotes de niveau mondial, dont les deux officiels Honda en Superbike pour 2020, Leon Haslam et Alvaro Bautista. Dont aussi Freddy Foray, (endurance), et l’ambassadeur Honda et ex-pilote du mondial Moto2, le Bernois Dominique Aegerter (en photo ci-dessus en piste avec le sous-signé).

Un résumé de ce test est disponible en vidéo via ce lien.

Les précédentes Fireblade étaient des motos efficaces sur circuit, mais qui pêchaient par la puissance maxi disponible par rapport à la concurrence. Et leurs aides électroniques au pilotage étaient plus calibrées pour assurer la sécurité de pilote, y compris sur la route, que pour améliorer ses chronos au tour (lire notre test de la Fireblade modèle 2017 à Portimao, et l’article listant les dernières mises à jour électroniques du modèle précédent). Mais les choses sont différentes à bord de la « triple R ».

Nous avons pu effectuer deux runs de 20 minutes et deux de 30 minutes sur ce circuit, par temps sec, avec des pneus slicks et à bord de la variante SP de Fireblade 2020, celle qui est équipée de suspensions électroniques semi-actives. On nous a demandé pour le premier run de laisser la machine dans le mode de pilotage Sport, sans rien toucher. Comme sur la version précédente de la CBR 1000, il existe plusieurs modes de pilotage sélectionnables, dans lesquels les courbes de puissance et de couple, les interventions du contrôle de traction, de la puissance moteur, de l’anti-cabrage et du frein moteur changent. Même chose d’ailleurs pour les ajustements des suspensions semi-actives.

Puis le deuxième passage s’est effectué en mode Track, dans lequel les aides électroniques interviennent moins et laissent plus de liberté au pilote. Là encore, sans rien changer aux réglages du mode. On peut modifier les paramètres de chacun des trois modes pré-établis, et même se concocter chacun des deux modes utilisateur selon ses préférences. Et si on se perd dans tous ces réglages, un choix du menu permet de retrouver les réglages de départ.

Fireblade écran
L’un des quatre environnements graphiques sélectionnables sur la nouvelle Fireblade.

Les deux derniers runs furent l’occasion d’affiner le test, de faire des comparaisons avant et après avoir changé tel paramètre des contrôles électroniques de la nouvelle Honda Fireblade « triple R ». Il y a beaucoup, beaucoup de possibilités. Mais c’est intuitif et on constate que les modes sont vraiment différents les uns des autres. Le mode Track et ses réglages permet au pilote d’effectuer des slides en entrée et en sortie de virage, tout en procurant un sentiment de sécurité.

Fireblade comodo
Le tableau de bord et les réglages électroniques se pilotent depuis ce comodo.

La seule intervention que l’on peut éventuellement sentir, c’est l’ABS (ajustable sur le mode route ou piste). Mais il est nettement moins intrusif que dans le millésime précédent de la Fireblade. Ce n’est vraiment qu’en allant chercher la limite que l’on pourra avoir des moments où l’électronique semble marquer une petite milliseconde de réflexion avant d’accompagner les impulsions du pilote. Bien sûr, qui veut faire de la course à haut niveau sur cette nouvelle Fireblade « Triple R » et qui en a le niveau pourra se passer de l’ABS. Il faudra pour cela probablement enlever le fusible correspondant. La moto étant à présent homologuée pour les nouvelles normes anti-pollution (entre autres) Euro 5, on ne peut plus le désactiver autrement. Mais la plupart des autres pilotes n’en ressentiront pas le besoin. Et puis les freins sont au top pour ce qui est de la dosabilité, de l’endurance…

La nouvelle Honda Fireblade a fait aussi un saut majeur en termes de performances. Elle n’a plus rien à voir avec la précédente, à part le fait qu’il y a bien toujours un moteur à 4 cylindres en ligne. Certains s’attendaient à un moteur de type V4,  comme c’est le cas sur le prototype de Honda en MotoGP, ou appelaient ce type d’architecture moteur de leurs voeux. Mais à l’intérieur de ce nouveau moteur, tout est différent. Les ingénieurs de la firme japonaise ont livré un véritable travail de fond pour trouver des pièces plus légères, mais tout aussi résistantes. Cela passe par l’entrée d’air, la boîte à air, la chambre de combustion, les pistons et bielles… au final, on a un maximum de 217 chevaux pour à peine plus de 200 kg, ce qui est plus que remarquable.

nouvelle Honda Fireblade
La nouvelle Fireblade a fait un grand pas en termes de performances sur circuit.

Pour tenir sous contrôle toute cette cavalerie, il y a les aides électroniques au pilotage, déjà mentionnées. Il y a aussi un châssis retravaillé pour la nouvelle Honda Fireblade, dont la rigidité a été augmentée, et un bras oscillant plus long, avec l’amortisseur dont le point d’attache est à présent directement ancré sur le moteur. Le centre de gravité est aussi placé plus haut, pour ne pas perdre en agilité malgré ce plus en rigidité. Sans oublier deux appendices ailés de chaque côté, à l’avant. Un peu comme sur les machines de MotoGP et certaines motos de Superbike. Cela doit augmenter la stabilité de la machine à haute vitesse. Et cela fonctionne plutôt bien. Il faut dire aussi que le réservoir d’essence a été rabaissé de plusieurs centimètres, et que cela permet de bien se cacher derrière la nouvelle bulle. De quoi atteindre des vitesses conséquentes dans les lignes droites et les longs virages rapides. Mais ce quatre-cylindres est aussi typiquement un quatre-cylindres sportif. Pour obtenir une accélération velue, il faut le pousser par-delà la moitié du compte-tours. Et là, il arrache les bras. Enfin, pas exactement, il vous propulse en avant avec une incroyable efficacité, sans avoir la brutalité du moteur de la BMW S 1000 RR, par exemple. Mais c’est tout aussi rapide.

Et tant qu’on ne sort pas la tête, les bras ou les pieds, rien ne bouge. Il faut aussi savoir que l’étagement de la boîte de vitesses ne favorise pas le couple à bas régime. Chaque rapport est long, très long. Sur ce circuit de Losail, je n’ai pas eu besoin d’utiliser une seule fois la sixième. J’étais déjà à 299 km/h en 5ème… qui veut rouler sur circuit et en compétition avec la « triple R » fera peut-être bien de changer le pignon de sortie de la transmission. On peut en effet perdre quelques centièmes dans les enfilades de virages et les changements de rythme si on n’y prend garde. En revanche, le passage d’un rapport à un autre, en montant ou en descendant, ne suscite aucune critique. On a un quickshifter bidirectionnel de série sur la SP (optionnel sur la version standard), et on peut régler, là aussi, sa sensibilité.

nouvelle Honda Fireblade
La nouvelle Fireblade « triple R » a fait des progrès aussi au freinage (son ABS est moins intrusif). Et l’aérodynamique et le châssis assurent une plus grande stabilité à haute vitesse.

Au passage, il faut saluer le fait que les normes Euro 5 n’ont pas rendue la nouvelle Honda Fireblade muette. La sonorité de son moteur, et aussi de son échappement, signé Akrapovic (d’origine) procure du plaisir aux oreilles et nous fait vibrer de l’intérieur lorsque l’on est en pleine charge.

Autre gros point positif, l’ergonomie. Tout est bien pensé, à la place qu’il faut, que ce soit le guidon, la configuration de la selle, les repose-pieds, les flancs du réservoir… éventuellement, il peut arriver que les bottes glissent un chouïa sur les repose-pieds dans certaines phases de mouvements du pilote. Et c’est tout. Il va sans dire que nous n’avons pas testé les rétroviseurs, ni l’éclairage.

Fireblade ailettes
Les ailettes latérales stabilisent la moto et assurent une meilleure directionnalité à haute vitesse.

En discutant avec d’autres pilotes rameutés par Honda pour donner de l’aura à cette présentation, j’ai vite compris que cette nouvelle machine pourrait bien replacer Honda au sommet de sa catégorie, au même niveau que les autres marques, pour ce qui est du championnat mondial Superbike. Nous avions avec nous à ce lancement presse au Qatar le Suisse Dominique Aegerter, ex-pilote du mondial Moto2 et actuel engagé dans le mondial Moto E. Mais aussi les deux officiels Honda dans la catégorie Superbike pour cette année, soit le vice-champion en titre, l’Espagnol Alvaro Bautista (l’an dernier chez Ducati), et l’Anglais Leon Haslam. Avec la nouvelle Honda Fireblade, ils savent qu’ils ont entre les mains une moto très différente de l’incarnation précédente. La preuve? Lors des derniers tests à Jerez et à Portimao, Leon Haslam a deux fois décroché le sixième temps, à un peu plus d’une seconde du champion en titre Jonathan Rea, respectivement à un peu plus de 8 dixièmes du troisième pilote de 2019, Toprak Razgatlioglu. Et ce sur une moto qui est à peine sortie de l’usine et n’a pas encore connu de vrai développement pour la compétition, contrairement à ses concurrentes.

Fireblade pilotes
Discussion entre pilotes: de gauche à droite, Dominique Aegerter, Leon Haslam, Alvaro Bautista et Freddy Foray dans le pitlane de Losail.

Au final, on ne relève pas vraiment de défaut pour cette « triple R », si ce n’est peut-être son prix. La SP est à plus de 28000 frs, la standard à 23890 francs. Mais pour cet argent, on a une machine au sommet de sa classe côté performance et équipement, et qui est aussi prête à courir. Une fois la somme déboursée, on n’aura plus à faire de gros investissement, et on se contentera probablement du pignon de sortie mentionné plus haut, de repose-pieds reculés, et d’un carénage en fibre qui puisse prendre les coups de la piste.

La nouvelle Honda Fireblade arrivera en Suisse en deux temps. La version SP est attendue en concessions d’ici la fin du mois de mars 2020, tandis que la version standard arrivera en gros un mois plus tard. Deux coloris seront disponibles pour chacune de ces deux versions: rouge, comme sur les photos ci-dessus, ou noire. Et quelques accessoires sont prévus, dont des pièces en carbone ou une sacoche de queue.

Galerie photos: CBR 1000 RR-R SP

Article à paraître sous une autre forme dans le magazine Moto Sport Suisse

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