Tourner entre les cônes, comme les policiers américains, nous avons testé en Suisse
Nous nous sommes inscrits à un cours donné par deux instructeurs de la franchise américaine Ride Like a Pro, organisé par le HOG (propriétaires de Harley-Davidson) Lemanic Coast Chapter sur un parking adjacent à la place d’arme vaudoise de Bière. Et nous avons fait des progrès dans l’agilité à basse vitesse!
Vous les avez tous vus au moins une fois dans votre vie, sur un réseau social ou lors d’un voyage aux Etats-Unis: des motards de police sur de gigantesques Harley-Davidson en train d’effectuer un parcours de gymkhana époustouflant de maîtrise et de précision entre des dizaines et des dizaines de cônes, sur un parking ou dans une cour.
Le temps de quatre journées, le club de propriétaires de motos de la marque américaine du canton de Vaud, le HOG Lemanic Coast Chapter, a permis que ce genre de maîtrise soit enseignée en terres vaudoises, en faisant venir deux instructeurs du célèbre cours US « Ride Like a Pro » en Suisse et en proposant une série de formations (payantes) avec ces deux instructeurs.
On doit cette initiative en grande partie à Yves Meier, un Harleyiste de la région d’Aubonne (qui a aussi été photographe pour ActuMoto.ch!). Yves avait déjà fait venir des formateurs des USA pour donner ce genre de cours en Suisse. C’était en 2019 et cela avait suscité beaucoup d’intérêt. Il a fallu attendre la fin de la pandémie et trouver du temps, de l’énergie et des soutiens pour à nouveau le proposer, en 2024!
Nous avons voulu voir si ce genre de cours apportait vraiment quelque chose, et donc nous nous sommes inscrits. Ou plus exactement les organisateurs nous ont gentiment fait cadeau de la franchise d’inscription en échange d’un reportage que vous êtes en train de commencer à lire!
Bien que ce cours ne nécessite pas du tout de rouler sur une Harley-Davidson, nous nous sommes pris au jeu et avons demandé à la filiale suisse de la marque américaine s’ils pouvaient nous prêter une de leurs machines durant quelques jours, en remplacement de la Ducati DesertX de l’auteur de ces lignes.
Les délais pour faire tout cela étant relativement courts, nous avons reçu non pas une grosse touring ou un gros cruiser de Harley-Davidson Switzerland, mais une Nightster 975 Special, une des remplaçantes du mythique Sportster, équipée d’un moteur de conception moderne et refroidi par liquide (lire notre test de la Nightster 975 standard, et la présentation de la Special).
Cette machine est bien sûr nettement moins lourde et imposante que, par exemple, les Road Glide, Sport Glide et autres Road King de certains participants et des deux Street Glide prêtées pour l’occasion par Harley-Davidson Lausanne aux deux instructeurs venus de Floride, Gary Roy et Randy Case (le premier est sinon sergent de police, le second employé d’une entreprise de sécurité).
Nous partions donc avec un petit avantage, bien involontaire, sur les autres inscrits, pour un après-midi entier de formation d’un niveau qualifié d’avancé. Gary et Randy avaient aussi des demi-journées de cours à proposer au niveau de la formation de base du cours Ride Like a Pro.
Une bonne partie de la petite dizaine de participants et participantes de notre groupe avaient déjà suivi cette formation de base, mais c’était en 2019. Il y avait donc au début de notre cours une série d’exercices pour raffraîchir les notions de base.
« Souvenez-vous de ce que vous avez appris, explique Gary en bon anglais américain, traduit au fur et à mesure en français pour ceux et celles qui ne pigent pas cette langue. Il faut constamment regarder là où vous voulez aller, donner du gaz et utiliser la pédale de frein, et contrôler avec le levier d’embrayage, en restant dans la zone de friction. »
La « zone de friction », traduction un peu approximative de « friction zone », est la position du levier d’embrayage qui fait que la transmission est engagée, mais pas complètement, ce qui permet de mieux maîtriser la marche en avant à basse vitesse, de manière plus fluide et contrôlée.
Et son collègue Randy fait une démonstration sur une série de « portes » (2 cônes côte à côte) qu’il faut passer les unes après les autres, en effectuant des virages à bien plus que 90 degrés. Puis c’est au tour des « élèves », l’un après l’autre. De quoi vérifier qu’ils ont bien assimilé ces techniques de base, et aussi qu’ils regardent bien et au bon moment là où ils doivent aller, qu’ils ont la bonne vitesse (au minimum 15-16 km/h) pour utiliser la force centrifuge et éviter de coucher la moto dans les virages serrés.
Après une première série d’exercices dans l’ensemble plutôt bien réussis, on passe à une autre série: faire demi-tour dans un « cul-de-sac » délimité par des cônes. Les virages plus ou moins serrés des participants et participantes vont servir aux deux instructeurs pour adapter les distances auxquelles ils poseront les cônes pour l’exercice suivant.
« Ta moto peut tourner bien plus serré que ça, encourage Gary. Tu dois ne pas avoir peur de pencher, et avoir assez de vitesse. Et contrôler ton virage en gardant une pression sur le frein arrière et en utilisant l’embrayage. » Toujours les mêmes bases, mais c’est dans la tête que ça se joue! Et aussi bien sûr dans la position du corps sur la moto.
On précise qu’il a été conseillé à tout le monde d’enlever les valises des motos, pour ceux qui en avaient. « C’est un cours avancé, et il est tout à fait possible que vous couchiez votre moto pendant un ou plusieurs exercices, avait prévenu Yves Meier. Ce serait dommage d’endommager vos valises. »
C’est à l’exercice suivant, entamé après une petite pause de relaxation, que les premières motos se couchent. Il s’agit d’une série de deux virages à angle droit, dans un couloir … de cônes. Pas assez de vitesse quand la moto est penchée, et c’est la chute. Sans aucune blessure autre que celle infligée à l’amour-propre. Et sans aucun dégât subi par la Harley.
Randy montre à la motarde, qui n’est pas très haute, comment relever seule sa machine de plus de 300 kilos. Et c’est facile! Hop, elle se remet en selle et passe au virage suivant, cette fois-ci sans tomber, mais en s’arrêtant au milieu du virage, avec la roue avant pile entre deux cônes. Comme si elle voulait continuer tout droit au lieu de tourner!
Le vieil adage qui dit que la moto va là où le ou la pilote porte son regard est évidemment toujours d’actualité. Gary prend la décision d’ouvrir un peu la sortie du second virage dans ce parcours-là. Mais une seconde motarde, sur une Harley longue et dont le levier d’embrayage est un peu capricieux, se prend elle aussi les pieds dans les cônes.
Il prend ensuite l’initiative de faire faire une nouvelle pause à tout le monde et de faire faire ce petit gymkhana à cette seconde motarde, Lucia, à pied! en lui demandant de porter son regard là où Gary le lui indique. Ce ne sera pas suffisant pour qu’elle réussisse tout cet exercice sans s’arrêter, mais on sent que quelque chose s’est délié dans son esprit et qu’il y a moins de stress.
Et après une nouvelle pause, les derniers exercices de ce cours avancé s’enchaînent: le trou de la serrure, le double « O », et ainsi de suite. Avec plus ou moins de bonheur, et toujours des petites erreurs qu’il faut sans cesse corriger: « Utilise tout l’espace à disposition, passe plus près des cônes! » Ou aussi « Prends un peu plus de vitesse, et pense à tourner ta tête plus tôt vers la sortie! »
On sent une certaine fatigue mentale, et probablement aussi physique, chez certains participants. Mais il n’y a presque plus de moto qui se couche …
Notre photographe Patrick voulant prendre en guise de final une vue d’ensemble, il nous a demandé à tous de faire en sorte que chaque zone d’exercice soit occupée par un ou des participants sur sa moto. Et là, tout d’un coup, certains et certaines se sont aperçus que les passages qui leur posaient problème allaient presque de soi. La preuve que la méthode choisie par Gary et Randy fonctionne!
A la fin du cours, tout le monde avait le sourire. Plus qu’une résolution à prendre: continuer à s’exercer! Ce genre de formation peut en effet s’avérer très utile si on l’applique au quotidien, pour faire demi-tour dans un parking, éviter un obstacle, etc.
L’auteur de ces lignes pensait avoir une bonne technique quand il roulait à basse vitesse avec une grosse moto. Il a découvert qu’il avait encore une grosse marge de progression! « Nous avons eu 80 personnes qui ont participé à ces cours, niveau de base ou avancé, détaille Géraldine, la présidente du HOG Lemanic Coast Chapter. » Parmi ces 80 personnes, des membres d’autres Chapters, y compris de Suisse allemande, ou des motards et et motardes sans lien particulier avec ce genre d’association. Il y avait même une BMW …
« J’étais là à la fin de chaque cours, continue la présidente du HOG Lemanic Coast Chapter, et je peux témoigner que tout le monde a progressé, même ceux ou celles qui avaient le plus de difficulté à manier leur moto. »
Un questionnaire de satisfaction a été envoyé à tous les participants, et les retours sont positifs. La demande est même là pour de nouvelles sessions de cônes, afin de retravailler les bases ou d’aller plus loin. A bon entendeur …
La conclusion de Géraldine: « C’était une grande opportunité de pouvoir faire venir ces deux instructeurs et de profiter de leur savoir-faire et de leur expérience dans ce genre de formation. Nous disons aussi un grand merci à Yves, sans qui ces cours n’auraient pas pu avoir lieu, aux membres du Chapter qui se sont investis pour tout cela, et à Harley-Davidson Lausanne, qui ont réussi à mettre à disposition deux motos pour les instructeurs, dans des délais courts, et qui nous ont donné un grand coup de main. »
Si vous voulez en savoir plus sur les cours et la méthode Ride Like a Pro, vous pouvez consulter le site web qui lui est consacré, ou celui mis sur pied par Gary et Randy pour leur formation à Palm Beach (Floride).
« Ici en Suisse, vous roulez clairement mieux que les motards que l’on voit chez nous, note encore avec un petit sourire Gary, qui est aussi sergent de police en Floride. Vous avez des routes avec beaucoup plus de virages! » Après les séances de cônes, il a eu droit à une session de « fondoue », avant de repartir aussi sec aux States.
