Routes valaisannes

20000 Lieux sur les Mers, un rallye-découverte en Valais où ce qui compte c’est l’altitude

Il y a des lieux cachés en Valais. Ou du moins qu’il faut chercher pour les débusquer. Le hameau de Némiaz, au dessus de Chamoson, est l’un d’entre eux.

Il est situé à 918 mètres d’altitude (le centre) et c’est un quartier de Chamoson. C’est aussi l’un des 60 lieux proposés comme points de passage possible par les organisateurs du rallye touristique 20000 Lieux sur les Mers, pour l’édition 2023, qui a eu lieu à la fin du moins de mai.

Ces dernières années, ce rallye avait lieu au mois de septembre (lire notre article sur l’édition 2020), ce qui donnait accès à toute une série de routes et de cols qui n’étaient pas encore ouverts en cette fin de mois de mai 2023. Mais les deux organisateurs, Bastien Schülé et Julien Borgeat, ont fait preuve d’inventivité pour proposer un événement qui permette malgré tout de bien sillonner le canton et ses routes intéressantes d’un point de vue motocycliste.

Nous – une équipe ActuMoto.ch/Moto Sport Suisse – y avons participé, dans le but de vous faire découvrir ce rallye, et ces lieux plus ou moins secrets accessibles à moto et dont regorge le canton du Valais.

Pour réussir le rallye, il faut cumuler les altitudes des lieux de passage choisis en un certain temps (20 heures non stop, ou deux fois 10 heures avec pause dodo au milieu), pour atteindre 20000 mètres. Ou 10000 si l’on s’inscrit pour la formule sur une seule journée (en 10 heures).

Il ne faut pas faire moins de mètres, mais pas plus non plus. « Vous avez une tolérance de plus ou moins 20 mètres », a expliqué Bastien Schülé aux participants de la formule une journée le dimanche matin (c’était aussi possible le samedi).

L’autre règle est que l’on peut passer par un maximum de deux points avant de revenir à la base, le Sunset Grill à Martigny. Dans la formule en une fois 10 heures, on peut utiliser un « joker » une fois et aller dans un autre bar, le William’s, à Granges (Valais central), auquel cas on pourra cumuler quatre points de passage avant de revenir à Martigny.

Il y a encore d’autres règles, que nous n’énumérerons pas toutes ici. Comme tous les participants et participantes s’étant inscrits pour la journée de dimanche, nous nous sommes rendus au bar-grill susmentionné dimanche matin (6h30), pour un rapide contrôle technique. Juste histoire de s’assurer que personne n’avait de grosse fuite d’huile ou des pneus complètement rincés.

La sécurité des motocyclistes est un point important pour Bastien et son collègue Julien. Raison pour laquelle le règlement de 20000 Lieux sur les Mers stipule qu’il faut faire des pauses d’au moins cinq minutes quand on revient à la base après être passé par un ou plusieurs points de passage. Il s’agit d’éviter tant que faire se peut des accidents dûs à la fatigue! Ah, et un manquement patent aux règles de la circulation induit la disqualification.

Dimanche tôt, nous nous retrouvons donc comme nos concurrents devant « la table », une carte grand format du Valais, avec soixante épingles fichées sur les 60 points de passage, chacune d’entre elle portant un chiffre qui correspond à l’altitude du point de passage concerné.

Il n’y a pas de nom, à part ce que l’on trouve écrit sur la carte, ni de coordonnées GPS. Une partie du charme de l’exercice consiste en fait à comprendre où précisément se trouvent les points de passage. Julien et Bastien sont de toutes façons là pour donner des indices et des conseils.

Comme il faut, pour réussir le rallye, passer par un certain nombre de districts cantonaux (il y en a huit dans le Valais francophone), il vaut la peine de prendre un peu de temps avant de grimper en selle et de partir pour les premiers points de passage. Histoire de bien construire son itinéraire, de faire les calculs pour les altitudes, etc.

Notre équipe se compose de trois motards: elle comprend Miguel, le plus jeune des trois, rédacteur-essayeur d’ActuMoto.ch, il y a le sous-signé, et il y a un invité spécial, François, qui fut jusqu’il y a peu le très apprécié président du Norton Sport Club de Genève. Le club qui organise notamment la célèbre course de côte genevoise de Verbois!

En attendant de retrouver notre photographe Olivier (agence Flash Press) au dessus de Verbier, nous branchons notre balise GPS, que nous devrons garder avec nous durant toute la durée du rallye, et nous choisissons nos deux premiers points de passage de la journée: l’arrivée du petit téléphérique à Champex d’Allesse, au dessus de Dorénaz (district de ), et le parking des installations hydro-électriques de la cascade dite de Pissevache, à Miéville, dans la vallée du Rhône, en contrebas.

La montée à Champex donne l’occasion de se dégourdir les roues. La route est étroite, elle sinue à souhait et elle est très peu fréquentée. Au « sommet », nous prenons le temps d’admirer la peinture murale représentant les installations de l’ancienne mine de charbon qui était extrait en altitude et transporté ensuite dans la plaine avec un téléphérique (bien plus primitif que celui que nous voyons aujourd’hui).

De retour à Martigny, c’est déjà décidé, nous entreprenons de remonter la vallée de la Dranse en direction de Verbier. Le bout de route entre Châbles et la station de sport d’hiver (et d’été), avec ses belles épingles larges et ses virages fluides, est déjà en soi un moment sympa. Mais il y a par contre ici pas mal de trafic.

Après avoir passé le village de Verbier, nous prenons de la hauteur et allons vers le col de Croix-de-Coeur, qui se trouve quand même à 2173 mètres (la table à Martigny disait 2174) d’altitude. Pas très connu, il permet de jouer à saute-montagne et d’ensuite redescendre dans la vallée du Rhône.

Et la vue depuis le sommet est juste fantastique! On y voit notamment des parapentistes qui profitent des courants, du dénivelé et de la pente accessible pour s’élancer.

Jusqu’il y a peu, la route qui redescend de l’autre côté, jusqu’à La Tzoumaz (anciennement, Les Mayens de Riddes), n’était pas goudronnée. Avec le passage des cyclistes du « Giro » juste quelques semaines avant 20000 Lieux sur les Mers, cette route est malheureusement (pour les amateurs d’enduro-balade) sortie de son statut exceptionnel de tronçon non asphalté ouvert à la circulation à moto. Elle est à présent recouverte d’un revêtement en dur qui n’est pas exactement du goudron, mais qui y ressemble. Tant mieux pour les possesseurs de sportives, tant pis pour ceux ou celles qui ont un trail!

Cela dit, la descente est toujours aussi jolie. Il faut juste faire un peu attention aux gravillons qui se trouvent encore ça et là sur la route. François, avec sa Yamaha XJR pesant trois tonnes (pardon, François), se montre prudent et ne prend pas trop de vitesse dans les virages. Il a parfaitement raison.

La descente entre La Tzoumaz et Riddes est de nature à nous donner des ailes, avec une route au bitume en assez bon état et de jolies virages.

De retour à Martigny, et comme le passage au départ du télésiège de la Tzoumaz fait aussi partie des points de passage du rallye, nous constatons que nous avons déjà dépassé les 5000 mètres d’altitude, et qu’il est déjà pas loin de 11 heures du matin. Il va falloir jouer stratégique pour la suite, pour ne pas trop dépasser les 10000 mètres tout en récoltant encore quelques belles photos pour cet article.

Nous décidons donc de monter sur la route du col des Planches, mais pas jusqu’au sommet. Cela fait juste un point de passage, à la hauteur du restaurant et hôtel Belvédère, à Chemin. Mais nous roulons encore quelques kilomètres, jusqu’à un virage qui se prête bien à une séance photo avec les trois motos en mouvement.

Deux de ces motos, une Honda CB 750 Hornet (lire notre test) et une Suzuki GSX-8S (lire notre essai) sont des prêts de la part de leur importateur suisse, dans le cadre d’un test comparatif avec trois motos bridables à 35 kW, et bridées à 35 kW pour les besoins de ce test.

Le jaune de la Hornet et le bleu de la Suzuki se détachent bien sur le vert-brun des prairies et des murs de graminées. Parfait pour les photos. Puis nous redescendons à Martigny et nous mettons en quête des points suivants.

Comme nous devons impérativement visiter un certain nombre de districts du Valais romand, et que de nombreux attraits, toujours du point de vue des motocyclistes, se trouvent en Valais central, nous prenons comme prochain points de passage deux endroits sur le coteau nord de Sion. Nous utiliserons ensuite notre joker pour pouvoir encore en faire deux dans la même région avant de rentrer.

Le dernier rendez-vous photographique est fixé avec Olivier au bord de l’Etang Long, dans la commune d’Arbaz, sur le flanc droite du Rhône, à un peu plus de 1100 m d’altitude. Cette localité offre deux magnifiques étangs aux promeneurs, et ils sont accessibles à moto (ou en voiture, ou en vélo …). Leur eau d’une magnifique couleur verte n’incite pas vraiment à la baignade, mais les promeneurs ne viennent pas pour cela.

Et on précise que la route qui grimpe sur le coteau depuis Sion est jolie, même s’il y a un peu de circulation en ce dimanche après-midi.

En cherchant un peu, sur la gauche en contrebas de la route qui mène à ces étangs, il y en a même un troisième, d’étang, qui est plus sauvage et moins fréquenté. Si vous êtes allergique à la foule.

Le second point de passage se situe sur le territoire de la même commune, là où se trouvent les terrains de foot. Nous y sommes accueillis, surprise, par des cavaliers et cavalières qui viennent d’effectuer une balade gourmande à cheval. Ils nous proposent gentiment à boire, nous voyant suer dans nos équipements de moto sous le soleil de fin de printemps. Nous déclinons en les remerciant, car il nous reste juste assez de temps pour boucler notre rallye.

Nous avons encore un plein d’essence à faire pour la Yamaha de François, et deux lieux à visiter: Némiaz, mentionné plus haut, et avant cela le point sur la route entre Aproz et Vétroz, dans la plaine du Rhône. Et puis c’est l’autoroute (en respectant les limitations!) jusqu’à Martigny, où nous devons arriver au plus tard à 17h (ou au pire 17h10).

Un peu plus d’une heure après, nous y sommes. Nous avons cumulé 9954 mètres d’altitude. C’est en dessous de la tolérance annoncée, mais on nous remet quand même notre diplôme de réussite, avec une bouteille de vin, des médailles, de la compote de fruit du Valais, et quelques autres petits souvenirs.

Avant de quitter Martigny, nous avons l’occasion de discuter, en embryon d’espagnol et en un peu d’anglais, avec Juan Noguerol, double champion mondial de tourisme, qui participe à 20000 Lieux sur les Mers pour la deuxième fois de sa carrière, au guidon de sa Ducati Multistrada V4. Cette fois, il est venu avec son épouse.

« Votre pays est juste un des plus beaux qu’on puisse trouver pour rouler à moto, et ce rallye est le meilleur rallye touristique », annonce Juan, des étoiles valaisannes plein les yeux. Et pour prouver ses dires, il nous montre plusieurs photos qu’il a prises durant ces deux journées, dont celle des Pyramides d’Euseigne. La route qui passe par elles est fermée en ce moment, pour cause de travaux. Mais il a pu s’en approcher suffisamment pour faire des photos!

Au passage, saluons le fait que 27 équipes (75 participants) s’étaient inscrits à cette édition 2023, un record de fréquentation. Et parmi ces 75 motocyclistes, il y a deux équipées qui ont cumulé exactement 20000 mètres, une qui a fait exactement deux fois 10000 mètres, et une qui a obtenu pile poil 10000 mètres. Nous leur tirons notre casquette!

Le rallye donne des points dans le cadre du championnat suisse de tourisme (organisé par la Fédération Motocycliste Suisse, la FMS), et il est aussi reconnu comme épreuve par la FIM (Fédération Internationale de Motocyclisme). D’ailleurs, en plus de Juan et de sa chère et tendre, deux équipes internationales étaient présentes.

Pour en savoir plus sur 20000 Lieux sur les Mers, vous pouvez consulter le site du rallye.