Test Ducati

Essai – La nouvelle Ducati Desmo 450 MX, un caractère à l’italienne?

Une fois de temps à autre, nous avons l’occasion de tester une nouvelle machine de cross. Ici, c’est tout simplement la première machine de  ce genre présentée par le constructeur italien Ducati, qui plus est une cylindrée de haut de championnat: la Desmo 450 MX. Nous l’avons essayée sur la piste de Grosswangen, en Suisse allemande, sur invitation de Ducati.

On pourra dire que cette Ducati Desmo 450 MX aura sû se faire attendre. Depuis 2021, l’année où l’idée a émergé dans les bureaux italiens, on a pu voir des photos, quelques mini brèves, des  »on dit »,  »il parait que » etc.

Cependant, elle s’apparentait plus à une grosse licorne qu’autre chose: un concept incroyable dont tout le monde parle, mais que personne n’a jamais vu! Il aura fallu attendre 2 ans de plus, soit 2023, pour que l’annonce se fasse officiellement.

Pourquoi tant de temps? Sûrement parce que Ducati avait ce projet ambitieux (venant d’une marque qui n’avait rien à voir avec le tout-terrain il y a pas si longtemps) et qu’ils savaient être attendus au tournant. Il ne fallait donc pas se louper!

D’autant plus que la marque est partie d’une feuille blanche et a complètement créé la moto sans aucune inspiration ou même copie sur ce qui se fait chez la concurrence.

Même si Ducati sait faire des motos, sa spécialité n’est clairement pas le milieu du cross! Ils ont pourtant tâché de transposer tout leur savoir autant mécanique qu’au niveau du châssis, pour créer une moto qui devait être aboutie le plus vite possible.

Car ne faisant pas les choses à moitié, la marque a décidé de commencer directement par la 450 cm3, la catégorie la plus relevée dans chaque championnat, et cela a donné la Desmo 450 MX.

Même si la philosophie prônée par Ducati est de mettre directement leurs motos en compétition pour avoir un développement optimal, afin ensuite de la proposer en série pour le grand public, débarquer directement en championnat national italien en 2024 s’est avéré payant.

Ils ont en effet raflé le titre dans les mains de Lupino dès la première année. Prometteur!

Il faut dire que la marque a eu le nez fin et a su s’entourer, car oui elle sait faire des motos, mais, on le répète, pas des motos de cross.

Ils ont notamment fait appel à Antonio Cairoli (un pilote italien multiple fois champion du monde et retiré désormais de la compétition) afin de superviser le développement de la Desmo 450 MX. Son expérience en compétition au plus haut niveau a sans nul doute permis de gagner un temps considérable.

La première chose qui saute aux yeux pour cette machine, c’est sa finition: tous les câbles sont gainés, peu de vis apparentes au niveau des plastiques qui possèdent d’ailleurs des zones de grip sur les ouïes de radiateur ainsi que les plaques latérales au niveau des zones de frottements.

Idem pour la protection de cadre au niveau des bottes. Les poignées sont particulièrement agréables, ainsi que la housse de selle, avec un bon grip.

Une fois dessus, je trouve personnellement que l’ergonomie n’est pas la meilleure de la catégorie. Les plastiques au niveau du radiateur sont relativement larges, ce qui vous écarte un peu les genoux en étant assis, de même pour tendre la jambe dans les virages.

De plus la selle est plutôt creusée, à l’instar d’une certaine Autrichienne également habillée de rouge/orange. Certes vous êtes bien calés, en revanche cela ne facilite pas les déplacements du pilote. Surtout pour moi qui mesure 1 m 85, je préfère les selles plus plates, quitte à ce qu’elles soient plus hautes.

Là, c’est bien sûr une question de goût et je suis sûr qu’elle pourra convenir quand même au plus grand nombre. Dernier mauvais point pour l’ergonomie, associé à ma grande taille, le guidon possède un profil relativement bas et très galbé.

Absolument rien de grave et chacun règlera au mieux son poste de pilotage, un peu plus handicapant pour moi en position debout. Justement en position debout, tout va mieux au niveau des jambes, la moto est fine et les genoux se placent parfaitement sur les plastiques pour la serrer au mieux.

Un coup sur le démarreur et la bête s’allume avec très peu de vibrations. Pour les premiers tours de roues et afin de découvrir le terrain, je sélectionne la « map » 1 au guidon. Elle est réglée pour être plus douce, avec un « Traction Control » et un frein moteur plus prononcés. Les premiers tours se font super facilement.

Connaissant les 450 pour en avoir eu une durant 4 ans, je m’attendais à quelque chose de caractériel comme savent le faire les Italiens. On sait que ces cylindrées sont particulièrement puissantes et ne sont pas à mettre entre toutes les mains sur un terrain de cross. Eh bien là, je suis un peu déconcerté…

Une douceur incroyable et une puissance pas du tout débordante, malgré les 63,5 ch annoncés par la marque. J’accélère le rythme petit à petit, mais quelle facilité! Le frein moteur n’est pas du tout handicapant, il y a très peu d’inertie qui vous emmène dans les virages, une sensation de légerté et de maniabilité entre les jambes… mais c’est quoi cette machine? C’est pas une 250, vous êtes sûrs?!

Avec ses 105 kg à peine (sans carburant), elle n’est pourtant pas la plus légère sur le papier. Mais on sait que ce n’est qu’un poid théorique et que la façon de se comporter en dynamique est bien plus importante.

Je n’ai jamais roulé de 450 aussi facile, moi qui craignait de devoir me battre un peu avec. Elle se comporte vraiment comme une cylindrée inférieure, mais la puissance en plus. Le moteur est rempli partout sans être violent, et pourtant elle sait avancer vite, très vite.

Ducati a transposé son expérience mécanique dans ce monocylindre avec une distribution desmodromique. Pour faire court, pas de ressorts de soupapes, moins de pièces en friction, pas de risque d’affolement de soupapes et donc des hauts-régimes particulièrement efficaces.

Cette 450 rupte à 11900 tr/min! L’allonge est infinie… « It revs to the moon » comme diraient les Américains. Là encore on se surprend à l’emmener un peu comme une 250. C’est particulièrement efficace, mais aussi très pratique pour les feignants du sélecteur, en vous évitant parfois de devoir passer la 3ème.

n imagine aussi que ça peut être une arme pour les départs, ce qui tend à être confirmé cette année en MXGP où la Ducati ne sort jamais loin derrière.

Ajoutez à cela que vous avez d’origine un quickshifter pour monter les rapports à la volée. Mais en pratique, j’ai trouvé que la boîte « grattait » un peu en l’utilisant, parfois même le rapport avait du mal à passer.

Je ne suis pas forcément convaincu par ce genre d’accessoire sur une moto de cross, outre le côté marketing, car je n’ai pas trouvé que cela amène un réel plus. Passer les rapports à la volée en soulageant un peu à l’embrayage comme d’habitude est sûrement tout aussi efficace et le feeling est plus doux sur le sélecteur.

En résumé, ce bloc moteur semble bien né, l’avenir nous en dira plus concernant sa fiabilité. On sait qu’en mondial Ducati a eu pas mal de déboires, mais un pilote amateur n’a pas le même budget qu’un team usine, ça sera donc un point à surveiller. D’autant plus que la marque annonce des intervalles de vidange toutes les 15h, ce qui me semble plutôt optimiste. Piston et soupapes à 45h et bas moteur à 90h…

Concernant le châssis, les Italiens sont partis sur une base classique de cadre en aluminium périmétrique avec le moins de soudures possible dans un souci de légèreté et de flexibilité. Le tout suspendu par la marque Showa, là encore une valeur sûre, cela donne un ensemble particulièrement homogène.

À aucun moment elle ne m’a remonté des réactions bizarres. Elle est vive, mais finalement très stable à la fois, même sur l’angle avec les gaz, on constate peu de louvoiements, pas de décrochages brutaux de la roue arrière, elle sait mettre en confiance.

On est bien aidé par un train avant précis. Je n’ai eu aucun guidonnage ou réaction qui vous donne des sueurs. Il faut préciser que la piste était neuve, donc quasiment aucun trou et peu d’ornières. L’ambiance sera sûrement un peu différente sur terrain défoncé, et chacun optera de toute façon pour des réglages de suspensions différents. Néanmoins la base est déjà très saine sans avoir touché à aucun réglage.

Bon point aussi concernant l’ensemble de freins Brembo qui se montre à la fois puissant et facilement dosable. On sait que parfois des freins très mordants sont handicapants, surtout sur les textures glissantes.

La piste de Grosswangen (LU) comportait plusieurs virages en dévers sur l’herbe en bas des descentes, où on arrive déjà sur l’angle avec pas mal de vitesse, et j’étais ravi dans ces situations de pouvoir doser mes freins avec minutie.

Mais la puissance reste bien présente, elle m’a sauvé quelques fois de freinages un peu optimistes! Avec la Desmo 450 MX, on arrive parfois très vite, trop vite, mais sans s’en rendre vraiment compte à cause de la facilité de la moto.

Seconde session, seconde map! La réponse à la poignée est plus réactive, il y a moins de frein moteur et un peu moins de Traction Control. Je m’attends donc à une moto plus radicale. Finalement non. Oui, la moto est bien différente en map 2, mais elle garde son côté exploitable et mes bras s’en réjouissent.

Je pense que cette « douceur » (sans oublier qu’on parle quand même d’une 450) sera redoutable sur les fins de manches et sur les terrains difficiles. Cependant, ceux qui adorent les moteurs qui arrachent pourront avoir sans nul doute la sensation qu’il en manque un peu.

Les maps sont cela dit modifiables via une application smartphone X-Link et un récepteur wifi disponible en supplément.

En plus des 2 modes, vous pourrez créer vos propres modes personnalisés agissant sur la réponse à la poignée, le frein moteur, le Traction Control ainsi que le Launch Control.

Cependant, je doute que cela révolutionnera la moto au point de la rendre ultra-agressive par exemple. Ne vous attendez pas à gagner encore 5 chevaux avec l’application. Il vous resterait enfin la possibilité de jouer avec la démultiplication finale, afin de vous rapprocher au mieux du caractère voulu.

Sur cette seconde cartographie, la puissance arrive plus rapidement mais elle ne vous déborde pas. Elle est bien aidée par un Traction Control innovant qui se veut particulièrement discret mais efficace.

Il ne bride en aucun cas la puissance de la moto, mais se base sur le patinage de la roue arrière, combiné à la vitesse de rotation de l’arbre à cames et aux les mesures inertielles de la moto.

Ducati annonce un système ultra-réactif et efficace qui, d’après leurs tests, permettrait de gagner parfois plus d’1,5 seconde sur un tour, selon le niveau du pilote. Libre à vous de le paramétrer dans l’app sur 4 niveaux différents, ou tout simplement de le déconnecter totalement et rapidement via le bouton au guidon.

Vous l’aurez compris, la Ducati Desmo 450 MX est bien née. Est-ce une copie parfaite? Tous les goûts et les couleurs sont dans la nature et chacun trouvera sa propre réponse. Cependant, on ne peut pas nier que le produit est bien abouti et réfléchi, donnant une moto d’une facilité déconcertante pour une 450.

Quid de la suite? Seul l’avenir pourra nous donner des retours sur la fiabilité de la machine, sa façon de vieillir et si des petits soucis de jeunesse sont encore à régler.

On sait qu’il n’est pas évident de débarquer avec un modèle complètement nouveau, avec peu de recul. Il sera donc possible que Ducati doive apporter des modifications par ci par là. Néanmoins, le potentiel est là. Cairoli a fait de belles piges notamment aux Etats Unis dernièrement, le retraité a encore un bon coup de gâchette!

Concernant Guadagnini et notre Seewer national en MXGP, les résultats sont plus mitigés malgré quelques belles perfs, cela manque de constance. Autant sur terrain « hard pack » on sent la Ducati au niveau, autant dans le sable voir même la boue, il reste encore un peu de travail pour être devant. Ce qui semble peut-être normal au vue de la jeunesse de la moto.

Sa petite soeur 250 est déjà aussi en test dans le championnat italien MX2, à nouveau dans les mains de Lupino, et on se réjouit d’avance de sa sortie pour le grand public. Car si la 450 est si facile, la 250 devrait l’être encore plus.

Si vous pensez être conquis par la belle italienne, vous disposerez d’une réduction plus ou moins importante si vous avez une licence. Autrement il faudra signer un chèque de 11790 francs.

Et il ne sera malgré tout pas évident de pouvoir la tester. Elle reste en effet encore rare sur le marché et encore plus dans les parcs coureurs. Seul quatre concessionnaires Ducati Suisse sont agréés pour vendre et entretenir ce modèle, dont Motos Vionnet pour la Romandie.

Il faudra donc pour certains parcourir pas mal de kilomètres pour aller chercher ou déposer leur Desmo 450 MX au garage, sans parler des pièces détachées…

Là encore, la situation est encore trop fraîche pour savoir si le réseau sera réactif et les pièces en permanence disponibles. Malgré tout, c’est un choix de la part de Ducati de créer une sorte de franchise en permettant de vendre cette moto uniquement via les concessionnaires Ducati qui se sont formés et ont investi dans cette aventure.

Espérons que dans le futur ils soient plus nombreux à se porter volontaires.

Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le site suisse de Ducati, ou contacter notre partenaire de notre Annuaire suisse des pros de la moto, Motos Vionnet à Sâles (FR).