A l’école du stunt suisse avec Jonathan Grossenbacher

Publié le 7 juin 2018 par Jérôme Ducret, mis à jour le 20 décembre 2019.

Photos: Roger Lohrer/Jérôme Ducret/DR.

Formation/initiation

A l’école du stunt suisse avec Jonathan Grossenbacher

Depuis près de deux ans, le seul stunter pro de Suisse propose de partager son savoir-faire en toute sécurité pa rle biais de cours ouverts à tous les motocyclistes. Nous avons testé, pour voir comment on réussit un lever de roue avant.

Non, les cours de la moto-école Mannhard ne sont pas la seule manière d’apprendre à réaliser des wheelies en Suisse (lire notre reportage). Il existe depuis un peu plus d’une année une école de stunt suisse, dirigée par le Neuchâtelois Jonathan Grossenbacher, la Swiss Stunt Riding School. On y apprend les bases de ce sport, le stunt, qui est aussi un art. Un mot que l’on pourrait traduire plus ou moins par « acrobatie ».

Nous avons pu tester durant une demi journée le cours pour débutants que donne Jonathan, jusqu’ici le seul stunter professionnel suisse.

Ce cours est ouvert à tout un chacun, les seules exigences étant de venir avec un équipement moto complet (gants, casques, veste avec protections, pantalon de même et chaussures montantes), un permis moto (au minimum permis d’élève de catégorie A limité)…  et de s’acquitter de la somme de 375 francs. Il se donne cette année sur le circuit de Lignières, dans le canton de Neuchâtel, et il reste encore des places en juillet, août et septembre.

Ce que nous avons testé est en fait un stage de découverte. « On commence par 45 minutes de théorie, sur ce que recouvre la discipline, sur quelles figures on peut faire, sur comment se placer sur la moto pour faire un wheelie en toute sécurité, dans quel ordre procéder, à quoi il faut faire attention, etc. » explique Jonathan.

Puis le « patron » embarque l’élève sur sa moto de stunt, une Triumph Street Triple bien modifiée, pour un baptême en tandem. On place ses mains sur les deux barres anti-crash à l’avant, ses fesses sur la selle et ses pieds… sur les repose-pieds (surtout pas sur le levier de frein ou le sélecteur). Et on laisse faire le pro, qui se met derrière vous et prend les commandes du guidon.

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En tandem, Jonathan aux commandes, et l’élève (le sous-signé) assis devant.

Au bout de quelques mètres, l’élève constate que l’on peut monter assez haut avant d’atteindre le point d’équilibre au-delà duquel la moto bascule vers l’arrière. Et l’on comprend par l’exemple la différence entre le lever de roue provoqué juste par la poignée des gaz, et celui où l’embrayage entre en scène. Le second est beaucoup plus efficace. « C’est ce dernier que l’on va pratiquer avec les motos utilisées pour ce cours, des KTM 390 Duke, explique Jonathan. Elles ont nettement moins de chevaux et de couple que la Triumph. Donc il faut être plus précis, trouver le bon régime pour le moteur, bien sentir le point de friction de l’embrayage et enchaîner les mouvements de manière exacte… » Idéal pour apprendre correctement le wheeling, donc.

Le passage sur les petites KTM se fait en deux temps. Une première fois sur des motos normales, mais munies de barres de protection en cas de chute, et une seconde fois avec les motos équipées en plus d’une sorte de chariot à deux roues latérales, chariot fixé sur la roue arrière de la KTM. Il stabilise la Duke et l’empêche de gigoter sur les côtés, ce qui permet de rouler très lentement pour pratiquer l’exercice. Et ce chariot, muni d’un tampon souple, est aussi là pour empêcher la moto de basculer en arrière.

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Le blocage est dans ma tête…

J’essaie donc d’abord sur la moto sans chariot. Et je n’arrive pas à lever la roue avant de plus que de quelques centimètres. « Tu as un blocage que l’on voit souvent chez des pilotes qui ont pas mal d’expérience de roulage derrière eux, explique le maître. Tu as le réflexe de couper les gaz dès que la moto lève, par exemple. C’est pour cela que l’on pratique avec le chariot, on peut aller chercher la limite, le point d’équilibre et même le point de basculement, en toute sécurité. Moi, j’ai dû apprendre tout ça sans ce genre de protection, sans être encadré, ça m’a pris pas mal de temps. »

Effectivement, au bout d’à peine cinq minutes d’essais avec le chariot, la 390 lève son pneu de plus en plus haut, sans effort. La démonstration est bluffante. Et puis le fait de ne pas devoir consacrer une partie de son attention à équilibrer l’engin pour éviter qu’il ne tombe à gauche ou à droite et pour le garder bien droit fait que l’on peut se concentrer réellement sur le wheelie! Les élèves ont une heure pour s’exercer, toujours sous la surveillance de Jonathan.

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Là, avec le chariot, ça monte! Sous l’oeil attentif de Jonathan.

Ils ont aussi l’occasion de réaliser un « burn ». Ce qui veut dire faire patiner la roue arrière en créant de la fumée. Là aussi, on a rarement l’occasion de s’y exercer dans des conditions sécurisées… et légales. Jonathan est le seul en Suisse à notre connaissance qui inclut cette figure dans un cours pour débutants.

« Jusqu’il y a peu, je pouvais accueillir un maximum de quatre personnes par cours, ajoute Jonathan Grossenbacher. Maintenant, je peux aller jusqu’à six. Et il y a aussi un nouveau cours de niveau plus avancé. Mais je préviens qu’il faut avoir déjà fait le cours de premier niveau pour s’y inscrire. »

Et au fond, à quoi ça sert, tout ça? « Un wheelie, en fait, en termes de pure efficacité, ça ne sert à rien, analyse le stunter. Au contraire, ça diminue la traction et la force qui vous fait avancer. Mais c’est un mode d’expression, c’est fun. Les gens qui viennent à mon cours disent souvent qu’ils ont essayé tout seuls. Sur la route, c’est illégal. Il y a une sorte de frustration qui peut s’établir. Mais si on le fait, il vaut de toute façon mieux savoir comment le contrôler pour ne pas tomber. » Il ajoute: « C’est un peu comme le circuit et la vitesse. Quand les élèves sortent de mon cours, la plupart du temps, ils ont pu dépenser leur énergie dans les figures, et en repartant ils roulent bien tranquillement. Ils ont eu ce qu’ils voulaient. »

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Une des figures exécutées par Jonathan au guidon de sa Street Triple pour le photographe.

Mais qu’en est-il de la pratique du stunt, wheelie compris, comme sport et art en Suisse? « Malheureusement, il n’existe aucun endroit en Suisse romande où l’on puisse le faire de manière régulière, sûre et sans trop dépenser », conclut Jonathan. Il a lui même commencé… sur l’aérodrome militaire de Payerne. Ou plus exactement sur une bande d’asphalte qui n’appartenait pas à l’aérodrome et qui n’était pas non plus (pas encore) utilisée pour le futur aéropole économique qui allait se développer plus tard.

Jonathana vite progressé, et il est arrivé en 2013 au sommet de son art. Après plusieurs participations à des compétitions européennes, il a décroché une place dans le top 15 à Lyon. Puis les autorités communales lui ont signifié qu’il ne pouvait plus utiliser l’aérodrome. Et Jonathan a bien été forcé de laisser tomber la compétition, pour ne plus que se concentrer sur les shows, et sur son métier de serrurier. Puis, plus récemment, aussi sur son école de stunt, à temps partiel. L’artiste est connu dans le milieu du stunt pour avoir plusieurs fois réussi une figure qui consiste à poser un genou en effectuant un wheelie.

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Le célèbre Rolf Biland, pluri-champion mondial suisse et légende du side-car, vient souvent dire bonjour… à vélo.

Dans l’immédiat, Jonathan, qui a créé une association avec son amie Fanny, motarde elle aussi, et son copain Alain, le mécanicien, est à la recherche d’autres terrains où pratiquer. « Nous allons probablement donner encore des cours à Lignière, mais je ne sais pas si nous pourrons nous permettre d’en avoir autant, explique Jonathan. Ce que je recherche en ce moment, c’est un terrain goudronné à louer, ou mieux, une halle couverte avec un sol goudronné, pour ne pas dépendre de la météo. Dans l’idéal, il faudrait un endroit en Suisse romande, et un autre en Suisse allemand. Jusqu’ici, je n’ai encore rien trouvé. » Avis aux propriétaires!

Pour plus de renseignements sur la Swiss Stunt Riding School, allez faire un tour sur leur site!

Article à paraître sous une autre forme dans le magazine Moto Sport Suisse

Commentaires7 commentaires

7 commentaires

  • Karl

    Merci Jérôme Ducret pour cet article fort intéressant et précis. Je suis un motard de 52 ans, passionné de moto et motard depuis 4 ans. Naturellement je n’ai jamais réussi à faire de wheelings sauf à délester la roue avant de quelques centimes. Penses tu vraiment qu’en suivant ce genre de stage, on puisse après réellement déclencher un wheeling d’au moins une vingtaine de cm en toute sécurité, toute confiance sans pour autant aller nécessairement chercher et garder le point équilibre ? et ceci par exemeple lors de balade moto avec les potes histoires de donner un peu de fun à nos sorties …

    • Jérôme Ducret

      Bonsoir Karl,
      Mon expérience prouve que oui. Alors ok j’avais déjà une petite base. Mais cela m’a fait progresser pas à pas en revenant aux fondamentaux, et en toute sécurité. Après, certaines motos sont plus faciles que d’autres pour ce genre d’exercice, les premières fois. Bizarrement, ma Ducati Monster 621 demande un gros effort, en raison de la répartition des masses. Une MT-07, par contre, c’est presque trop facile. Le cours te donne une idée assez précise d’où se situe la limite, et de quoi faire si la roue avant échappe à ton contrôle. Et surtout, c’est de la pratique, pas que de la théorie. Donc oui, je pense que cela permet vraiment de le faire après avec une bonne marge de sécurité. En sachant que c’est (malheureusement) illégal sur la route…

      Jérôme Ducret, rédacteur responsable

  • Zaher

    Bonjour votre adresse svp car je trouve votre adresse sur le site merci

    • Jérôme Ducret

      Bonjour

      Vous pouvez trouver Jonathan à Moudon, en Suisse, dans les locaux du Centre Pédagogique Romand de Pilotage (CPRP).

      Bonne journée

      Jérôme Ducret, rédacteur responsable

  • Vitelli

    Bonjour,
    Qu’est-ce que je dois faire pour pouvoir prendre des cours de stunt ?

    • Jérôme Ducret

      Bonjour

      Vous adresser à celui qui les donne. Son adresse internet figure dans l’article.

      Une toute bonne journée

      Jérôme Ducret, rédacteur responsable

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